Fin des 90’s, boom du manga en France. Parmi les nombreux nouveaux arrivants, les éditions J’ai Lu se lancent de manière boulimique dans la BD japonaise. Pléthores de titres vont sortir avec le rythme de parution frénétique d’un tome tous les mois et marqués par une communication médiatique désastreuse si ce n’est inexistante, ce qui causera leur perte avec probablement le fait que leur papier est le plus dégueulasse qu’il m’ait jamais été donné de feuilleter. Pourtant, ils eurent un des meilleurs catalogues de l’époque : Jojo Bizarre Adventure, Hokuto no Ken, Dragon Quest, Captain Tsubasa…..et Racaille Blues !!
Super Punch-Out / Racailles Blues !!
Racaille Blues donc, c’est l’odyssée d’un abruti au cœur d’or sacrément balaise appelé Taison Maeda. Les 42 tomes de la série (comme Dragon Ball, et oui !) nous narrent son histoire et celle de ses potes de l’entrée en seconde au certificat de fin d’études. Lorsqu’il débarque au lycée Teiken de Kichijoji, Maeda en devient le caïd en seulement quelques baffes. A lire ces lignes, on pourrait se dire qu’on est face à une énième histoire de gangs de lycéens mais ce qui fait la grande force de Racaille Blues est que son personnage principal est totalement désintéressé par ce rôle. C’est même un crétin fini, Koheiji Nakata, ultime rival en amour de Maeda (ou pas) qui s’impose en tant que tel à l’aide de rumeurs et quiproquos savoureux. Maeda, ce qui l’intéresse, c’est la boxe, deuxième thème récurrent de l’œuvre (après la baston lycéenne vous l’aurez compris).
C’est bien connu, un personnage principal charismatique est primordial mais la qualité du scénario de Morita est d’introduire régulièrement de nouveaux protagonistes en leur créant une véritable personnalité ainsi qu’un passif, distillé souvent plusieurs tomes plus tard. De ce fait, chacun se retrouve à deux ou trois reprises au cœur de l’histoire et il y a une vraie dynamique autour des personnages et on a vraiment l’impression de tous les suivre en simultané à l’inverse de nombreux shonen où les persos viennent faire un coucou tous les 3 tomes (coucou Chaozu et Oolong !). On retrouve ainsi Katsuji et Yoneji, grand front et gros pif, les meilleurs amis de Maeda, pour le meilleur et souvent pour le pire, Ebihara, le beau-grosse au bandana, Wajima, le redoublant, Hatanaka le jeune boxeur…. Plusieurs dizaines d’entre eux vont alimenter les nombreuses histoires de Racaille Blues.
D’ailleurs, la série s’articule autour de grandes histoires qui sont généralement associées à un gros bad guy de fin de niveau venant d’un lycée extérieur. On est dans du ultra classique mais vraiment bien maitrisé tant les scènes de castagne et les enjeux sont bien ficelés. Ainsi, Maeda aura à se taper les 3 autres « rois de Tokyo » et divers enfoirés venant de tous coins du Japon. La baston contre Onizuka (non pas celui-là) ou contre les gars d’Osaka restent de grands moments de bravoure.
Ces histoires sont entrecoupées de récits courts, soit à caractère humoristique (Nakata, ou bien le prof Ioka en prennent souvent pour leur grade) soit amenées à développer le background de personnages secondaires (pourquoi Mutoha a une cicatrice sous l’œil, comment Maeda a rencontré Katsuji et Yoneiji…). Celles-ci permettent astucieusement d’utiliser les « temps morts » pour développer les personnages et renforcent l’esprit de cohésion et de camaraderie des « racailles » du lycée Teiken. A noter qu’à la suite des arcs principaux de la série, de mini histoires humoristiques de 2 ou 3 pages font intervenir les protagonistes en Super Deformed dans des situations complètement débiles !
La marotte de Maeda, c’est la boxe, bien qu’au final il n’y connaisse rien au début du manga. Son seul atout étant un punch d’une puissance redoutable. C’est d’ailleurs pour cela qu’il va se prendre certaines raclées, du fait de son manque de technique. Tout du long du manga il va croiser d’autres boxeurs qui vont le motiver ( Hatanaka, Seikichi….). Petit à petit, il va acquérir des techniques lui permettant de mettre la pâtée à de puissants adversaires dans des combats de rue . Mais pour passer pro, il lui faudra ranger les poings pour chausser les gants…. Là-dessus, Racaille Blues reste très nekketsu, à savoir que les ennemis d’aujourd’hui deviennent les alliés de demain.
Je parle beaucoup de mecs et de castagne mais il y a des femmes aussi dans Racaille Blues. Un peu. A commencer par Chiaki, la copine ( ou pas ?) de Maeda et sa meilleure amie Kazumi. La copine du héros est un peu une femme fragile et réservée et se fait souvent embarquer par des vilains pas beaux. Depuis Mario et la princesse Peach, il doit y avoir un vrai problème de société au Japon. C’est aussi un peu le cas des deux profs d’arts plastiques que compte la série. Une est brossée de la même manière et l’autre est une pimbêche. Il n’y a que Mafuyu qui est un personnage intéressant, venant d’une bande de bosozoku (motards japonais) et en quête de rédemption. C’est aussi le seul personnage féminin étant au cœur d’une histoire (sur 42 tomes, rappelons-le).
A poor lonesome writer…in France
Œuvre phare de Morita, c’est aussi à travers elle que l’auteur a affiné son style. Le dessin des 10 premiers tomes est assez chargé en traits et certains visages sont un poil loupé mais son trait s’affine au fur et à mesure pour finir par être d’une grande clarté. Le découpage est par contre excellent dès le début et la lecture est extrêmement fluide, ce qui est agréable sur ce type de manga.
Racaille Blues a aussi eu l’honneur d’être adapté en drama (série TV live) avec des acteurs maquillés comme des bagnoles volées. N’étant pas adepte d’adaptation live japonaise, votre serviteur a passé son chemin.
Adulé au Japon, Masanori Morita a plutôt trouvé un destin maudit par chez nous. Nous avons encore la chance (pour combien de temps ?) de pouvoir acheter sa superbe série de baseball Rookies ou encore son excellent recueil de nouvelles Shiba Inu mais sa dernière série en date qui devait s’intituler Les rois du rire a purement et simplement été annulée par Tonkam, du fait d’une trop grande complexité à traduire les nombreux jeux de mots qui y figuraient. La faible portée du nom de l’auteur a sûrement du jouer également. A l’heure actuelle, Racaille Blues se trouve en occaz’ à des prix plus ou moins abusés mais reste un classique indétrônable dans sa catégorie : le shonen de lycée. Pendant 42 tomes, vous n’aurez qu’une envie : avoir connu une pareille bande de potes au bahut.
Une réédition serait des plus féériques, l’édition J’ai lu étant assez faiblarde sur certaines traductions ( l’accent du Kansaï traduit en accent marseillais…si….si…) et avec un papier Lotus de seconde catégorie. Cela reste malheureusement une utopie….
4 commentaires
Ca fait tellement plaisir de voir un post sur rokudenashi blues!!Pour ma part j’ai découvert le mangas dans les jumps en version japonaise a l’age de 9 ans,a peu près tout mes mangas sont en jap,vu qu’a l’époque c’était pas traduit,pour moi la meilleure époque avec slam dunk,captain tsubasa…etc.Rokudenashi blues reste pour moi le meilleur mangas de l’auteur!!!!
Et pour moi le meilleur manga du Jump : JoJo’s Bizarre Adventure !
J’ai eu la chance de pouvoir emprunter la série à ma bibliothèque municipale mais oui, une réédition serait vraiment bienvenue.
Ça fait plaisir de voir qu’il y a des fans de Morita dans les parages. ma grande déception reste que Tonkam ait décidé de ne pas traduire Beshari Gurashi bien qu’ils aient les droits…