Après Thomas David, Rémy Tremblay, Stéphane Simon et Stéphane Nguyen, c’est au tour de Patrick Masson de se prêter au jeu des questions-réponses pour le site GGS. C’est un grand sculpteur français qui touche vraiment à tous les styles. Son travail est magnifique. Il répond à nos questions et nous fait profiter de son expérience et de son parcours très particulier. L’équipe GGS le remercie pour sa participation.
Vous pouvez retrouver son actualité sur les sites Artiktoys et Deviant Art, ainsi que sur le facebook The Small et le facebook de ArtikToys.
N’hésitez pas à consulter la galerie en fin d’article pour vous rendre compte du travail de titan accompli par Patrick.
Même si tu es connu des fans de sculpture, peux-tu te présenter pour les novices qui ne jurent que par Games Workshop ? Patrick Masson surnommé The Small, pour un lien qui devient évident dès que l’on me croise. J’ai 38 ans déjà… ouch… je suis marié et j’ai 3 garçons (12 ans, 10 ans et demi et 6 ans et demi)… ouch… déjà aussi. Nous habitons dans une maison à nous dans un petit village des Vosges, Uriménil (tout proche d’Epinal). Je suis sculpteur free-lance à temps plein depuis Mai 2011, date à laquelle j’ai décidé de quitter mon travail d’ingénieur développement de turbos automobiles et d’entamer cette reconversion mais j’y reviendrai plus tard. Je travaille et ai travaillé pour plusieurs marques : Ammon Miniatures, Smart Max, Studio Mc Vey, Eden, Mierce Miniatures, Arena Rex, Twisted, … mais mon client principal est CoolMiniOrNot et son jeu DarkAge. Mon site www.artiktoys.com n’est toujours pas fait mais il renvoie vers différents endroits où l’on peut voir mon travail. J’ai également une petite marque à moi, Artik Toys qui me permet d’éditer des projets persos quand je trouve le temps.
Comment as-tu découvert les figurines à peindre et à collectionner ? Alors c’est un peu particulier, j’ai commencé à jouer aux jeux de rôle très jeune (7 ans) avec un de mes grand frères. Un tout petit peu avec Donjons & Dragons puis sur de nombreux autres: Empire Galactique, Stormbringer, In Nomine Satanis / Magna Veritas, etc… Vous me direz, quel rapport avec la figurine ? Et bien, pour illustrer certaines scènes du jeu, il nous arrivait d’utiliser des figurines (Ral Partha et Citadel). Mais à l’époque, je ne pensais ni à les peindre et encore moins à en sculpter. Je ne me posais même pas la question de savoir comment c’était fait et par qui, ah ces jeunes. Nous en avions donc pas mal à la maison, mais cela ne m’intéressait qu’au travers de nos parties de jeux de rôle, comme accessoires.
Nous avons de moins en moins utilisé de figurines en grandissant et quand j’ai arrêté de jouer aux JdR pour mes études d’ingénieur, j’ai complètement oublié ces petits bonhommes en métal. Je n’ai redécouvert ce milieu qu’un petit peu vers 2000, puis vraiment en 2009, j’y reviendrai. Je suis donc presque un néophyte et n’en déplaise à beaucoup, je ne connais que très peu l’univers de GW, ni les sculpteurs et les peintres qui ont marqué son histoire (les seuls jeux de la marque auquel j’ai joué étant Space Hulk et Space Crusade).
Tu t’es fait remarquer avec ton niveau de sculpture impressionnant. Comment as-tu développé ce style si particulier ? J’essaie juste de faire du mieux que je peux à chaque pièce et de faire un peu mieux que la précédente à chaque fois. Bon c’est l’intention, car souvent ça ne marche pas comme je le voudrais. Je ne sais pas non plus si j’ai un style particulier, peut être un petit quelque chose qui fait que certains reconnaissent mes pièces mais cela vient peut être plus de la façon de prendre les photos que de la sculpture en elle même. Il est vrai qu’au début on m’a associé à un style cartoon car les premières pièces que j’ai montrées étaient de ce style, mais que ce soit pour du cartoon ou autre, je cherche toujours à apporter un peu de réalisme dans le traitement. Mais comme le faisait remarquer Thomas David, en tant que sculpteur free-lance, on doit le plus souvent s’adapter au style donné par le concept que l’on reçoit en essayant de le retranscrire au mieux.
Comment en es-tu venu à la sculpture ? J’ai découvert la sculpture vers mes 15 ans, quand mon petit frère a essayé la Fimo pour la première fois. A l’époque, je dessinais toujours le même personnage et je voulais le faire en volume. J’ai tout de suite aimé la Fimo et depuis ce moment, je me suis mis à en faire pendant les vacances, le plus souvent pour faire des cadeaux à la famille ou aux amis. Il s’agissait la plupart du temps de personnages issus de la BD (d’où mon attrait pour ce genre de volumes). Ne sachant pas peindre du tout, je faisais tout en Fimo directement en couleur, en faisant mes mélanges pour coller au mieux aux dessins. Leur tailles oscillaient le plus souvent entre 60 et 100 mm. Mais comme mes études ont commencé à me demander plus de temps je ne faisais qu’une ou deux pièces par an tout au plus.
Comment as-tu réussi à en faire ton métier ? En 1999, j’ai commencé à travailler comme ingénieur aux alentours de Paris. A l’époque, à un mondial du jeu, j’ai montré les photos de mes pièces à Fenryll, suite à quoi je lui ai fait 3 petit dragons pour sa gamme et un gros (sur une illustration de mon frère) pour la sortie du jeux de rôle Prophécy, mes 4 premières « commandes ». J’ai ensuite sculpté une figurine de Crisse pour un projet qui n’a pas abouti. Me retrouvant au chômage en 2002, je me suis mis à chercher du travail, soit comme ingénieur, soit comme sculpteur en Para-BD et c’est l’ingénieur qui a gagné. J’ai alors laissé la sculpture de côté, le travail et la vie de famille obligent. Puis en 2006 avec un ami dessinateur Arnaud Saran, un auteur Arnaud Gérard et un webmaster Frédéric Chollet, nous créons un site LTDK La Tribu De Konraad, puis un blog pour montrer nos divers travaux, ce qui me replonge dans la sculpture. Je refais alors 3 commandes pour Dungeon Twister en 2007 (mes 3 premières 30mm), puis je m’attaque à un personnage d’Arnaud : Mr Bone. Je présente ce dernier à mon premier concours de figurines, à Montrouge en 2009, en me disant que c’est tellement différent de ce qui se fait et dans une autre échelle que je n’aurai sûrement rien. Je dois dire que la médaille d’argent que je ramène alors est sans aucun doute l’événement qui m’a poussé à reprendre sérieusement. C’est donc à ce moment que je découvre avec plaisir le petit monde de la figurine, des concours et toute une bande de copains. Suivent alors un Loup Garou et Barney the Steamthing, 2 pièces qui marquent certainement un gros tournant dans ma qualité de sculpture (j’y reviendrai plus tard). Au même moment, je déteste de plus en plus mon travail d’ingénieur et me vois de moins en moins pouvoir continuer. En 2010, par le biais du blog, je reçois quelques nouvelles commandes en 30mm pour Carnevale, je fais également le Dr Octopus pour Ammon Miniatures. Je pense alors qu’il y a peut être moyen d’avoir plus de commandes mais je n’ai pas assez de temps pour en prendre plus. Je profite alors d’un plan de départ volontaire pour quitter ma boîte et me lancer à temps plein dans le métier de sculpteur free-lance en Mai 2011. Je m’étais donné un an pour que cela marche. J’ai alors démarché plusieurs boites par mail, en montrant ce que j’avais fait jusque là, fait des essais pour chacune et il faut croire que cela ne s’est pas trop mal passé puisque depuis je ne fais plus que sculpter des petits bonhommes toute la journée.
Quels conseils donnerais-tu à une personne qui voudrait se lancer dans cette aventure ? S’il s’agit d’un vrai choix, ne pas avoir peur et croire en soi, se lancer et y aller au culot. Montrer ce que l’on fait, ne pas hésiter à se former tout seul, auprès d’autres et en ligne et évoluer en écoutant les critiques. Mais surtout être conscient que passer d’un loisir (passion) à un travail est un changement important. Tout le monde dira, c’est super de vivre de sa passion, oui c’est vrai et je ne reviendrai pas en arrière, c’est sûr. Mais quand cela devient un travail, il y a les contraintes qui vont avec, parfois ce n’est pas drôle, parfois on se plante et il faut refaire, parfois on n’a pas envie de bosser mais il faut quand même s’y mettre. Bref, comme tout métier, car oui c’est un métier qui demande une exigence et du « professionnalisme » sans vouloir être trop pompeux. Et comme l’ont si bien dit mes prédécesseurs lors de leurs interviews ici, travailler chez soi, c’est génial mais tout le monde ne peut pas.
Quelles sont tes inspirations ? Il y en a tellement! Je dois avouer que le net est une source infinie d’inspirations, il y a tellement d’artistes fabuleux qui me poussent à progresser et me donnent envie de créer. Je n’en citerai que quelques uns, pour le dessin : mon frère Thierry Masson, mon ami Arnaud Saran, Brom, Frazetta, Moebius, Loisel, et tellement plus… pour la sculpture : Mark Newman, Edward Eyth, Simon Lee, Philippe Faraut, Rémy Tremblay, Allan Carrasco, Pedro Fernandez, Jacques Alexandre Gillois et énormément d’autres.
Quelles sont tes techniques de sculpture ? Pour la sculpture, rien de particulier, je sculpte en Fimo (un mélange de Fimo classique Champagne et de Fimo Soft gris dauphin auquel je rajoute une touche de Fimo noire pour avoir un gris plus foncé proche de la résine). J’utilise du Magic pour les armes et quelques bouts d’armure selon les cas et du tube et fil de laiton pour les parties mécaniques. Plus jeune, je faisais tout en Fimo je ne sais pas bien pourquoi à posteriori. Pour la méthode, je démarre d’une armature en fil de fer sur laquelle je pose du Green Stuff pour faire adhérer la Fimo (dire qu’avant je ne connaissais pas, ça marche mais c’est plus dur), ensuite je pose toujours une anatomie (ça fait partie de mon apprentissage) que je viens habiller en démarrant des pieds jusqu’à la tête puis les bras. Je fini toujours par les mains et j’adore ça car je trouve que c’est le moment où la figurine prend vie, c’est incroyable ce que les mains apportent comme expression je trouve.
Et en peinture ?
Pour la peinture elles sont nulles, je ne sais pas peindre. Il faudra quand même un jour que je me décide à essayer.
As-tu présenté des figurines à des concours ? Comment ça s’est passé ? Comme dit précédemment, ma première pièce présentée est Mister Bone à Montrouge en 2009 (l’année où je découvre que ce genre de concours existe, en fait) où j’ai l’argent dans la catégorie Green, à ma plus grande surprise. J’ai depuis participé à plusieurs concours, toujours en catégorie Green, Couëron, Painting Crusade, FiMaJe, MFCA en ramenant l’argent ou l’or. Celui qui m’a le plus marqué reste mon premier Mix Open Ravage en 2009 où j’avais présenté mon Loup Garou et Barney The Steamthing et où j’ai eu le Best of Sculpture. C’est sûrement grâce à Barney et à ce concours que j’ai commencé à être remarqué, il reste donc le plus important pour moi. Mon dernier en date est le MFCA avec Wolverine, une pièce peinte par Mohamed Ait-Mehdi et avec laquelle nous avons ramené un or dans la catégorie Fantasy Open.
Tout le monde trippe sur les deux personnages de Clio & Erato. Peux-tu nous en dire plus ? Comment es-tu monté à bord de cet étrange projet ?
Alors pour ce projet, j’ai été contacté par Matteo en juin 2013. Il m’a envoyé le dessin de ces 2 filles Clio et Erato et je suis vraiment tombé amoureux. Je ne sais pas trop décrire pourquoi mais il y avait quelque chose dans l’ambiance qui m’a tout de suite plu. Ce côté triste des visages et l’ambiguïté entre le côté enfantin des filles et le pistolet. Il y a toute une histoire qui se dégage de cette scène alors qu’elle ne montre rien. De plus cela changeait complètement avec ce que je fais d’habitude et du coup cela m’attirait encore plus.
Bref, j’étais emballé mais j’étais déjà booké jusque début 2014. Comme le projet n’était pas urgent, j’ai eu la chance que Matteo ait pu attendre jusque là et j’ai commencé à travailler sur ce concept en février 2014.
Il s’agit d’un des projets les plus compliqués que j’aie eu à faire jusqu’ici, même s’il ne parait pas si complexe que cela, le fait de devoir sculpter les deux filles afin qu’elles fonctionnent aussi bien en couple qu’en version séparée a été un petit challenge. Mais je suis vraiment très content du résultat.
Pour en dire un peu plus sur le projet de Matteo, au départ cela s’appelait Off Girl et l’idée était de sortir une gamme de figurines autour de son univers décliné dans une BD. Le projet a évolué et désormais il s’appelle VENERI BLU, je vous invite a en découvrir plus sur sa page facebook. L’atmosphère qui se dégage de son trait et de l’univers qu’il est en train de créer est très intéressant.
Malheureusement, la partie figurine a bloqué pour diverses raisons que je ne connais pas et la production de Clio et Erato était très compromise. Suite à l’engouement qu’a suscité la présentation des masters à la PC et à Montrouge, j’ai poussé Matteo et l’ai aidé à trouver une solution de production et je suis donc très content de vous annoncer ici qu’elles seront bien produites et sont au moulage depuis quelques temps déjà. Je ne peux annoncer la boite pour l’instant pour lui en laisser la primeur mais j’ai hâte de les voir sortir et découvrir les superbes versions peintes qui suivront.
En fonction du succès des ventes, espérons que d’autres viendront par la suite car personnellement il y a déjà un certain nombre de dessins du site que je verrais bien en figurines.
Joues-tu aux jeux de figurines ? J’ai joué à Space Hulk, Space Crusade, Hero Quest et autres à leur sortie, puis oublié ça jusque récemment. Maintenant que je baigne dedans et que je peux jouer avec mes garçons je me suis mis à Zombicide, Da Clash, Super Dungeon Explore et je vais essayer Escape bientôt. Je ne suis pas un « addict » mais j’aime bien ça de temps en temps.
Mis à part la figurine, as-tu d’autres passions ? Non je n’aurai pas le temps pour deux, mais j’aime beaucoup le sport et j’ai réussi à m’y remettre ces derniers temps avec la folie de cette année de me mettre au rugby… non, non, ce n’est pas une blague…
Quels sont tes futurs projets en matière de figurines ? Continuer mes commandes pour Dark Age, continuer aussi avec d’autres marques pour changer d’univers et de style et réussir à me donner plus de temps pour des projets personnels comme ressortir quelques trucs pour ma gamme Artik Toys. Il y en a tellement qui se battent dans ma tête qu’il faut absolument que je trouve le moyen de les faire sortir !
Nous te remercions d’avoir répondu à nos questions et nous suivrons de près ton travail.
7 commentaires
Un parcours de malade. Bravo d’avoir eu le courage de faire de ta passion ton métier!
Merci beaucoup à toute l’équipe 🙂
Super chouette! j’aime beaucoup ton travail et j’ai vraiment apprécié de voir tes pièces irl à la PC 🙂
Merci, content que cela te plaise 🙂
Très belle rétrospective, et splendide galerie de masters, Patrick.
Continue, on en veut encore !
^^
Stéph.
Merci Stéph., on va essayer 😉
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