Kaze Kiri : Ninja Action est un jeu d’action à scrolling horizontal comme on en faisait des tonnes à l’époque.
Sorti en Avril 1994 sur le support Super CD-rom de la PC Engine et développé par Naxat Soft, les responsables, entre autres excellents titres, de Recca Summer Carnival ’92 sur Famicom et Coryoon sur Hu-card, Kaze Kiri reste aujourd’hui assez méconnu du grand public.
Pourtant il y a beaucoup à dire à son sujet.
Décortiquons tout ça.
HISTORIQUE
En 1994, alors que Nintendo annonce l’échec de son partenariat avec Sony pour la future console avec lecteur CD-Rom ; d’autres concurrents, plus discrets comme NEC, continuent d’avancer tranquillement mais sûrement vers l’avenir. Eux l’ont déjà ce support CD, depuis 1988.
Clairement en avance sur son temps, la société japonaise sort en 1991 une évolution de son lecteur CD-Rom. Baptisé « Super CD-Rom 2 », la machine sera inclue dans le modèle « PC-Engine Duo » (NEC et Hudson Soft), qui permettra de lire à la fois les jeux NEC au format Hu-card et les jeux au format CD-Rom / Super CD-Rom.
Ce support verra de nombreux excellents titres sortir, dont la plupart ne franchiront pas les frontières. Peu distribué aux USA (sous le nom de Turbo Duo) ou chez nous (par Sodipeng – Société distributrice de PC Engine), la console contient un processeur 8 bits d’une qualité exceptionnelle et processeur vidéo de 16bits. Les productions CD-Rom permettront aux joueurs de profiter de musiques de haute qualité ou bien encore d’animations 2D travaillées.
Imaginez qu’à l’époque, chaque tile graphique affiché à l’écran pour le background ne devait pas dépasser 8×8 pixels, avec au maximum 16 couleurs ; et les sprites ne pouvaient être plus de 64 au même moment à l’écran… Toute une époque, de contraintes, de réglages pour les graphistes et les développeurs, pour l’équipe qui devait à chaque fois s’arracher les cheveux pour faire rentrer la ROM et la faire tourner proprement sur la machine…
Et en 1994, alors que le constructeur NEC annonce la sortie d’une nouvelle machine baptisée « PC-FX », Naxat Soft, toujours un peu en retard sur ses productions, va sortir un excellent jeu d’action à scrolling 2D sur support Super CD-Rom : Kaze Kiri Ninja Action.
On va analyser un peu son contenu aujourd’hui, quelques 20 années après sa sortie, pour voir si finalement ce jeu valait quelque chose.
SCÉNARIO / AMBIANCE
Nous sommes au Japon, à l’époque féodale, probablement aux alentours du 14-16ème siècle de notre ère.
« KAZE » est un Ninja. Fraîchement anobli par son dojo provincial, il part à la recherche de princesse Shizu qui vient de se faire kidnapper. »
Voilà.
Vous êtes donc un Ninja, et devez infiltrer à votre manière les troupes ennemies responsables de la capture de ladite princesse. Pas grand chose à rajouter, l’intérêt n’étant vraiment pas à ce niveau.
Vous rencontrerez quelques « notorious enemies » (comprendre « avec un nom propre à chacun ») au cours de votre aventure – en gros les boss –
Vous êtes seul contre tous, et serez assailli par des hordes d’ennemis tous plus ressemblant les uns que les autres, pour essayer d’accomplir votre mission.
L’ambiance est heureusement assez bien retranscrite, vous infiltrez les places ennemies pour tuer les différents boss qui vous barrent la route et essayent de garder la meuf chez eux.
C’est clairement n’importe quoi à ce niveau, remplit de clichés tous plus bidons les uns que les autres. On ne sait pas qui est la princesse, ni pourquoi elle est réellement enlevée. Tout ceci n’est qu’un prétexte pour aller buter tous les mecs qui vous barreront la route. Au fond, on s’en fiche un peu étant donné l’intérêt porté par les joueurs sur ce genre de titre au scénario. Ce qu’on recherche ? de l’action, de la baston et un gameplay et level design qui tiennent la route.
Alors ça donne quoi à ce niveau ?
GAMEPLAY
Si je devais trouver un mot simple pour résumer le gameplay de Kaze Kiri Ninja Action, je dirais simplement : répétitif.
Heureusement, les mouvements proposés sont assez sympas et bien dynamiques pour nous tenir en haleine, sinon ce serait clairement une torture.
Kaze Kiri est un jeu de type Beat’em Up. Vous allez évoluer dans des niveaux très plats et linéaires, avec juste un décor de fond, où vous devrez vous balader de gauche à droite pour tuer le nombre d’ennemis nécessaire pour faire apparaitre à un endroit du niveau, le boss qui vous permettra de passer au niveau suivant.
C’est vraiment très répétitif, vous allez scruter sans arrêt votre jauge « ENEMY » en haut à droite du HUD pour voir combien de gars il vous faut encore tuer pour aller au boss et passer au niveau suivant, qui sera quasi identique. Le background change, quelques ennemis changent ou sont plus résistants, mais foncièrement, vous ferez la même chose tout du long.
Je ne sais pas si cela tient du génie ou de l’abus de facilité, mais ça marche, et pour une autre raison : les techniques mises à dispositions du joueur pour tuer les ennemis. On va vous les détailler, histoire que vous compreniez pourquoi c’est jouissif de jouer au jeu.
Déjà, sachez que le jeu se joue avec une manette standard 2 boutons. Donc si vous êtes avec votre manette 6 boutons RX, switchez sur « 2 ».
Mouvements de votre personnage :
- Glissade : en appuyant deux fois vers l’avant, votre personnage se jette au sol pour attaquer les ennemis. Un léger temps de latence est à prendre en compte entre le moment où vous êtes au sol et celui où vous pourrez parer à nouveau les assauts des ennemis.
- Kunai : la touche « 2 » sert à lancer des kunai (sorte de couteau pointu à double lame tranchante que lançaient en autres, les Ninja.) Attention à l’utilisation des kunai, car plus vous en tirerez, plus votre énergie baissera. Le nombre de lancé est illimité, car quand vous ne lancez pas de Kunais, votre énergie remonte si vous ne vous faites pas toucher . Les ennemis n’ont pas trop de mal à parer les attaques aux Kunais, mais regardez bien votre jauge de vie en haut à gauche lorsque vous spammez la touche.
- Coup de pied plongeant : faites BAS + la touche action lorsque vous êtes en l’air pour attaquer vos ennemis depuis les airs. Peu utile, car bien trop souvent paré par les ennemis.
- Disparition : en appuyant sur la touche « SELECT » de votre pad, Kaze disparait un court instant. Cela vous permet d’éviter par exemple de vous faire toucher par une attaque d’un boss. Prenez tout de même en compte que le temps de latence avant de pouvoir bouger à nouveau est proche de la demi seconde. C’est une technique pas très accessible (select??), mais c’est voulu, pour qu’à chaque utilisation, le joueur a vraiment voulu cette action, et ce n’est pas le fruit du hasard. Une bonne idée en soit, mais qui n’est pas très bien utilisée je pense. On aurait aimé par exemple pouvoir disparaitre également en l’air, ou bien que ce soit mieux intégré au gameplay. Là c’est plutôt : je suis au sol et je fais rien « hop je disparais ».
- Salto avant et arrière : en appuyant sur BAS + la touche de saut, vous effectuerez un salto arrière pour éviter des attaques ennemies. Si vous appuyez sur HAUT + la touche de saut, Kaze effectuera un salto avant. Cette action, dans les deux cas, s’effectue très rapidement, et permet d’être invincible pendant un cours instant, ce qui est très intéressant au niveau du gameplay.
- Coups au corps à corps : lorsque vous êtes au corps à corps des ennemis, vous pourrez les enchainer. C’est très dynamique, ça fait plaisir
- Prise : au corps à corps, si vous êtes assez près de l’ennemi et que vous appuyez sur AVANT + la touche d’action, kaze fera une prise à l’adversaire.
- Course : vous avez la possibilité de courir rapidement en appuyant sur la diagonale avant haut de votre pad. Si vous sautez alors, vous sauterez plus loin.
Tous ces mouvements vous assurent de ne jamais vous ennuyer pendant le jeu. Le souci principal étant probablement l’absence quasi totale de challenge. Vous avez tellement de coups disponibles qu’en réalité, le jeu est bien trop simple au final. Car les ennemis sont très prévisibles. Même les boss. Alors pour le coup ça, c’est un mal pour un bien. Vous savez, dans les beat’em all, cette sensation de ne jamais vraiment savoir si vous allez être touché par le boss, si son pattern n’est pas en train de vous faire une entourloupette… Généralement, on peut dire que les pattern des boss dans ce type de jeu sont assez simplistes et surtout souvent imprévisibles, car ils sortent souvent de l’écran, réapparaissent, leur hitbox est assez floue et on peut facilement rager parce qu’ils ont toujours priorité sur le joueur…
Hé bien là, c’est complètement l’inverse. Les boss sont super cool à combattre, parce qu’on comprend leur pattern, qu’on peut les affronter en toute quiétude. Mais c’est un peu trop simple.
Pour finir, Kaze est vraiment bien animé, fluide, et ses actions disponibles permettent de varier un minimum votre approche des combats. J’ai envie de dire heureusement qu’on est ok à ce niveau, parce que la suite, ça se corse…
LEVEL DESIGN
Oula la… Alors là on touche presque le fond du basic de chez basic.
Bon alors pour rappel, on est dans un Beat’em up, donc on s’attend aisément à avoir des niveaux plutôt linéaires, qui vont d’un point A vers B, là où vous attendra le boss…
Ouais, sauf que là, c’est trop, trop linéaire.
Pour faire court, les niveaux ne sont pas grands, les ennemis arrivent par vagues successives, par la gauche ou la droite de l’écran, parfois par le haut. Dans votre HUD, en haut à droite, il y a une jauge, qui diminue plus vous tuez d’ennemis. Le souci justement est un peu là. À savoir que par exemple, si vous tracez vers la droite de l’écran en tuant tous les ennemis du niveau qui vous barrent la route, vous arriverez à un endroit où un mur se dresse, et où il ne se passe rien. Tout simplement parce qu’il faut que la jauge arrive à 0 pour enclencher l’event suivant à savoir le boss.
Donc vous faites quoi à ce moment ?
→ Je vous le donne en mille : vous faites demi-tour, et repartez à la chasse d’ennemis pour descendre votre jauge. Une fois la jauge vide, comme par hasard il n’y a plus personne dans le niveau, et à droite de l’écran (ou à gauche, suivant sa construction), et ben cette fois, le boss sera là…
Archi barbant !!!
Parce qu’en plus, si les niveau avaient un vrai intérêt, genre avec un peu de plateforme, des pièges même simples, des trous, des items à récupérer ou autre, bah on s’ennuierait pas. Mais là NON !! Il n’y a rien dans les niveaux, rien du tout, que dalle, nada : peau d’zob ! Uniquement des ennemis qui vous attaquent… pas de challenge ou d’objets qui auraient pu apporter un intérêt, pas de plateforme, pas de… pas de… pas de LD en fait non ?
Pas un putain de poulet à croquer, pas un radis à récupérer sur les corps des ennemis, pas une arme à upgrader, pas un fuckin’ piège à éviter ou quelques plateformes à grimper. C’est plat, et complètement sans intérêt à ce niveau.
Alors me direz-vous, pourquoi le jeu est-il par certains assez encensé ?
Pour moi deux raisons :
- La première, c’est que définitivement, le gameplay et son dynamisme attire, et ça se comprend, c’est vraiment jouissif par moments et même si on voyait mieux (ou aussi bien) sur bien des points dans d’autres jeux d’époque, peu peuvent se vanter d’être aussi dynamique et réactif au niveau de la prise en main du personnage. C’est fluide et très rapide, ça compense le LD ? pas sûr…
- La seconde, c’est que la NEC est pour moi complètement surfaite et que certains jeux sont légendaires pour pas grand chose (là j’entends déjà certains défenseurs s’offusquer et me brûler sur la place publique), mais non, je n’en démords pas. Même à l’époque, il y avait mieux, largement. Du moins niveau Level design et Game Design, c’est clair et net. D’ailleurs, je prépare actuellement d’autres dossiers sur des jeux NEC bien connus, histoire de démentir un peu quelques « Y’a quelqu’un qui m’a dit…. » sur la console.
En tous les cas, le Level Design du jeu n’est pas du tout défendable, ça c’est certain.
Du coup la question à 1 milliard de brouzoufs serait de se demander si un bon gameplay annule un Level Design misérable, si de beaux graphismes (c’est le cas) annulent l’ennui lié au décor et au contenu même du jeu.
C’est très discutable si vous voulez mon avis quand même. Parce que le LD fait partie intégrante du fun dans un jeu. La diversité des actions, des objectifs des levels, du contenu des niveaux ou des patterns des ennemis, tout ceci est lié et font la recette d’un excellent titre, et là où Kaze Kiri avait TOUT pour réussir, il échoue lamentablement sur la marche d’un podium hyper prisé des excellents titres. Trop peu de moyens sur la fin de la prod ou autre, là n’est pas la question, nous jugeons le résultat, qui n’est pas à la hauteur pour cette partie, et malheureusement, ça entache gravement l’intégralité du titre.
GRAPHISMES / DA
Le japon, époque médiévale.
On ressent ici plutôt bien l’ambiance, et dans les niveaux, que ce soit dans les dojos ou en extérieur, l’ambiance est parfaitement retranscrite. Au niveau DA, on est dans un style complètement manga, avec un charadesign proche de celui proposé par Mika Hakitaka dans Ginga Fukei Densetsu Sapphire à mon humble avis.
Les animations des personnages ingame sont plutôt léchées, dynamiques et à la japonaise, avec donc peu de frames en intervalles pour donner une forte sensation de rapidité au visuel final. En gros, tout l’inverse d’un titre occidental de base, qui lorsqu’ils recherchent à faire de belles animations, détaillent purement et simplement les frames, laissant transparaitre un mouvement hyper léché, mais du coup, le jeu est injouable, trop lent et les animations ne peuvent être coupées.
Ici on a pas ce souci, du coup, c’est un pur plaisir d’évoluer avec Kaze dans les niveaux, car on a une vraie impression de dynamisme, saupoudré d’un rendu excellent. Donc c’est très bien.
Les décors de fond sont très beaux, on regrettera quand même un manque certain de profondeur de champ et de contenu en background. Dommage…
La scène d’intro est quant à elle une belle mise en scène de successions d’artworks en pixel-art, certains sont légèrement animés, on y croit, c’est le principal.
Graphiquement, le jeu se défend par endroit, notamment dans certains stages, vraiment très sympathiques. Mais on pourra tout de même regretter une trop forte redondance dans les décors de fond des dojos et des toits de maisons japonaises. C’est trop peu varié pour prendre du plaisir à admirer un peu la vue, dont d’ailleurs le background est littéralement vide. En demi-teinte donc…
MUSIQUES /SD
Au milieu de tout ça, on a heureusement (ou en plus, au choix) des musiques de qualité proposées dans le jeu par la Sunteam. Elles sauront à la fois vous mettre dans l’ambiance, et être assez dynamiques pour vous donner la niaque de continuer à découper les ennemis.
Comme on est sur un support CD-Rom, elles sont entièrement digitalisées, et le mastering est de qualité tout du long. On le comprendra dès l’introduction et l’écran titre avec le voicing digitalisé.
Parfois, on aura de simples bruits de fond pour mettre le joueur dans l’ambiance et le reste du temps, des musiques à la limite du « fasto-pop ». Ça fonctionne.
Voici quelques musiques du jeu (18 en fait), allez donc voir du côté de la NO11 et celle du staff roll, qui sont vraiment cool !
CONCLUSION
Avis à ceux qui possèdent une PC Engine Duo ou bien un CD Rom pour faire tourner le jeu, foncez, si vous aimez les Beat’em up, il reste un bon défouloir, assez facile d’approche une fois toutes les techniques bien en main, vous allez prendre du plaisir à esquiver les attaques des boss, à leur mettre un beau perfect, et à avancer dans le jeu.
Ceux qui n’ont pas encore franchi le cap de l’achat d’une console, essayez-le avant, ce jeu ne nécessite pas vraiment l’achat d’une console, à moins d’être un énorme fan de beat’em up. Petit hic, il coûte en moyenne environ 80€, un petit investissement au vu de la durée de vie du jeu, même avec les fins multiples. Le jeu se finit en 1 heure max, avec les deux fins… On y revient assez facilement car le gameplay est très accessible et vraiment plaisant. Donc vraiment dommage pour le reste (LD, entre autres…).
Après, je reste tout de même sur mon avis que comme beaucoup de titres NEC, la qualité finale du jeu est surfaite. C’est un bon beat, mais loin d’être une référence absolue, même remis dans son contexte.
Matez donc quelques vidéos avant de vous lancer dans l’aventure si vous voulez mon avis.
Kaze Kiri Ninja Action - NEC PC Engine
Avis à ceux qui possèdent une PC Engine Duo ou bien un CD Rom pour faire tourner le jeu, foncez, si vous aimez les Beat'em up, il reste un bon défouloir, assez facile d'approche une fois toutes les techniques bien en main, vous allez prendre du plaisir à esquiver les attaques des boss, à leur mettre un beau perfect, et à avancer dans le jeu.
-
Graphismes8.8
-
Gameplay8.4
-
Scénario6
-
Level Design2
-
Durée de vie6
-
Musiques8
Un commentaire
J’ai pris plaisir à lire cet article, parce que, 4 ans après sa rédaction, je me demandais si l’investissement en valait le coup (et 4 ans après on ne parle plus de 80 euros)
Donc merci pour ce test.
Par contre, je rebondis sur ce que tu dis, à propos de cet aspect « surfait » de la machine. car moi aussi au début j’étais un peu déçu. Mais avec le temps, j’ai surtout compris que c’est une console qui se mérite
– c’est déjà pas facile d’avoir une image bien propre, comme sur megadrive ou SFC
– acheter un lecteur CDROM c’est mettre le doigt dans l’engrenage de la maintenance
– il faut bien choisir son jeu (déjà à cause de la barrière de la langue, plus handicapante à mon sens que sur SFC)
Si on accepte de lui consacrer un peu de de temps, c’est vraiment une machine qui vaut le détour