La Révolution PlayStation – Ken Kutaragi & Les Hommes de l’ombre

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Aujourd’hui, je vais vous présenter non pas un, mais deux ouvrages : La Révolution PlayStation – Ken Kutaragi, écrit par Reiji Asakura (écrivain s’intéressant aux nouvelles technologies) et La Révolution PlayStation – Les Hommes de l’Ombre, écrit par Ryôji Akagawa (membre de l’équipe de Sony Computer Entertainment ayant contribué à l’élaboration et au développement de la PlayStation).

Ces deux livres sont parus aux éditions Pix’n Love en décembre 2012 et ont été proposé dans un coffret collector les regroupant. Ils étaient également en vente individuellement. La Révolution PlayStation – Ken Kutaragi est actuellement vendu seul au prix de 21€ et La Révolution PlayStation – Les Hommes de L’ombre est à 18€ (mais en rupture de stock actuellement). Le coffret collector regroupant les deux ouvrages n’est plus disponible.

Ces deux livres sont indépendants et ont été regroupés par Pix dans le but d’offrir aux lecteurs une vision complémentaire et détaillée de ce qui s’est passé chez Sony au moment de la conception de la PlayStation.

Packaging

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Les deux livres sont contenus dans un fourreau cartonné plutôt cheap de couleur grise siglé des fameux symboles Triangle-Rond-Croix-Carré. Lorsqu’on le regarde de plus prêt, on se rend compte que le fond n’est pas uni et que d’innombrables combinaisons Triangle-Rond-Croix-Carré le jalonnent. Le logo Triangle-Rond-Croix-Carré apparaissant en grand sur le fourreau est lui même constitué de petites formes. Il en va de même pour les couvertures des deux livres, où les formes sont incrustées en surbrillance, ainsi que pour les visuels de la console et de la manette. Effet garanti !

Les deux livres ont une couverture cartonnée. Leurs formats est en A5. Le premier comporte 239 pages et le second 175.

Il est à noter que le volume 1 de la Révolution PlayStation a été réédité fin 2015 avec une couverture souple (visuel beaucoup moins joli que celui de l’édition de 2012) et un nombre de pages légèrement inférieur (sans doute une mise en page différente).

contenu

Commençons par l’ouvrage consacré à Ken Kutaragi. Il est décomposé en 8 chapitres :

  • Ken Kutaragi, le passionné toujours au cœur de la controverse, où l’on découvre que le copain de Barbie, bien avant la conception de la Playstation, avait déjà des idées très élaborées sur les technologies en développement et leur avenir : le System G, le LCD, le numérique…
  • « Do it ! » la prise de décision, chapitre où l’on revit de l’intérieur de chez Sony la trahison de Nintendo concernant le partenariat pour un lecteur CD compatible avec la Super Famicom et la décision déterminante de Norio Ôga, alors PDG de Sony, de continuer le projet Playstation seul.

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  • Séduire les éditeurs de jeux, oui parce que se lancer dans le développement d’un hardware, c’est bien, mais sans jeux pour porter le projet, ça sent l’eau de boudin… On y découvre alors comment Ken Kutaragi et ses acolytes ont fait des allers-retours chez les développeurs pour présenter leur projet, avec un peu d’enthousiasme en retour, mais surtout beaucoup de craintes des éditeurs pensant que Sony devrait annuler son projet, Nintendo faisant figure de dominant dans le secteur. Et puis vient la sortie de Virtua Fighter de Sega en arcade… La révolution de la 3D est en marche ! Gros coup de pouce pour la PlayStation !
  • La Révolution dans la distribution : la stratégie de la rupture, où l’on découvre le projet d’achat-revente au Japon des jeux aux éditeurs par Sony afin de contrôler plus facilement le marché et faire face à la demande grâce aux qualités de repressage rapide du support CD-ROM utilisé par la PlayStation et la mise à contribution des usines Sony de disques musicaux pour la fabrication des CD de jeux PS1. Ce nouveau modèle économique présentant pourtant de nombreux avantages était toutefois décrié par les éditeurs de jeux voulant s’occuper eux-même de la distribution de leurs jeux, par l’intermédiaire de différents grossistes (système Shoshinkai mis en place par Nintendo).
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Ken Kutaragi

  • Créer la console gagnante : l’intelligence des algorithmes est un chapitre un peu technique (mais finalement pas tant que ça) où l’on nous parle de puces, de processeurs, de MIPS (qu’est-ce que cette drôle de bête?) et où l’on découvre que Kutaragi avait anticipé l’évolution des composants et de leurs coûts largement en amont pour fixer la date de sortie possible de sa console. Un visionnaire ce type !
  • Les relations amour-haine de Sony : Toutes les portes ne se sont pas ouvertes comme par magie pour faire avancer le projet de Kutaragi. Lors de la création de SCE, Sony et Sony Music détiennent chacun 50% des parts. Sony Music a été embarqué un peu contre son gré dans ce projet pour mettre à contribution sa large trésorerie et ses compétences en termes de technologie sur CD.
  • La bataille pour le contrôle aux États-Unis. Sony of America fait office de vilain petit canard. Elle conteste toutes les décisions prises au Japon. Il faut dire qu’une des filiale de Sony of America faisait un commerce prospère en développant quelques jeux sur Super Nintendo et Genesis. Alors pourquoi mettre un terme à un marché lucratif au profit d’une console n’ayant pas encore fait ses preuves.
  • Les conseils de Kutaragi en matière de projets d’entreprise, au nombre de 9.

Un extrait du livre sur Ken Kutaragi qui résume assez bien le livre :

Après sa rencontre fortuite avec le System G, Ken Kutaragi concevra la PlayStation, et c’est en travaillant comme un forcené qu’il ne cessera de promouvoir sa création. Après l’échec de la collaboration avec Nintendo, la décision de Sony de poursuivre le projet indépendamment conduira à la conception d’une nouvelle architecture, à celle de nouveaux composants, à la création d’un projet d’affaires novateur, au recrutement d’éditeurs de jeux et enfin à la lutte de pouvoir avec l’équipe de direction américaine.

En réponse aux obsessions de Kutaragi, Satô aura créé le modèle de distribution basé sur l’achat-revente, qui révolutionnera l’industrie du jeu, Gotô aura donné naissance à ses designs intemporels, Maruyama aura apporté sa grande expertise des affaires chez Sony Music et Tokunaka aura géré ce projet avec zèle et d’une main de fer.

Si l’ouvrage est largement consacré à Ken Kutaragi, une place de choix est tout de même accordé à ses compagnons de route car rien n’aurait été possible sans le soutien de son équipe.

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Parlons maintenant du volume 2 de la Révolution PlayStation intitulé Les Hommes de l’Ombre. Il s’agit d’un recueil d’interviews et de souvenirs personnels de différents acteurs de la scène PlayStation. Tout ça a été remis en ordre pour suivre le plan suivant :

  • La préhistoire (jusqu’à 1992) : projet de console développé conjointement par Sony et Nintendo.
  • Trahison et remise en cause : retour sur la bombe lâchée au CES de 1991.
  • Do it ! Sony se lance seul dans l’aventure.
  • Réactions… Présentation du prototype PlayStation aux acteurs software.
  • Un hardware nommé PlayStation et les avancées de la Video Game Music. On y trouve le témoignage fort intéressant de Teiyû Gotô, le designer de la console et la manette PlayStation. On y découvre un tas d’anecdotes sur sa création. Il y a ensuite l’interview de deux musiciens sur l’utilisation d’enregistrements d’orchestres symphoniques pour les jeux PlayStation.
  • La « touche » PlayStation : une console n’est rien sans jeux. Loin de pouvoir compter sur de nombreux éditeurs tiers, plutôt méfiant au départ sur le devenir de la PlayStation, la division software de SCE se doit de créer des jeux pour sa machine. Il en résultera le jeu musical PaRappa the Rapper ou encore Arc the Lad, le premier RPG à sortir sur la machine de Sony, entre autres.

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  • Le bouleversement des mécanismes de l’industrie : échanges sur la création d’une librairie pour la conception des jeux, la mise en place d’un support du constructeur auprès des développeurs et le système d’achat-revente des jeux des éditeurs par Sony pour méthode de distribution.
  • 3 décembre 1994 : retour sur les différentes étapes avant la commercialisation de la console à cette date au Japon.
  • Des résultats inespérés : les campagnes de pubs sur le million de consoles vendues, la grosse baisse de prix sept mois après la sortie de la console, la démocratisation des CD de démo et l’arrivée de Square et de son FFVII dans les filets de la PlayStation.
  • Une culture du jeu vidéo remise en question : SCE sur tous les fronts, support hardware et software.
  • Quelle était donc cette fameuse « révolution » PlayStation ? La PlayStation n’est pas que le fruit du travail d’un seul homme, Ken Kutaragi mais est le résultat du travail consenti par son équipe. Chacun de ses collaborateurs a apporté sa pierre à l’édifice.
  • on termine par un épilogue présentant rapidement les événements qui ont marqué la sortie de la PlayStation sur les marchés nord-américains et européens.

Il est à noter que dans cette ouvrage, on peut retrouver de petites photos en noir et blanc de la plupart des personnes interviewées en bas de page, avec une rapide présentation de leur rôle. On retrouve également quelques pages avec des scans de journaux japonais d’époque.

 

conclusion

Sans la volonté farouche de Kutaragi, la Playsation ne serait pas ce qu’elle est aujourd’hui. Norio Ôga

Les deux livres ne sont pas à placer au même niveau. Le premier tome se lit très bien et est très complet. J’ai parfois été un peu perdue lors de certains flashbacks, le livre n’étant pas forcément tout le temps par ordre chronologique, chaque chapitre reprenant un thème bien précis du développement de la PlayStation. En fait, j’ai d’abord été étonnée du contenu au fur et à mesure de la lecture, car ce livre étant intitulé Ken Kutaragi, je m’attendais à ce qu’il lui soit dédié et en fait non, il y a une grosse tartine sur lui, mais aussi une grosse tartine sur ses collaborateurs les plus proches : Satô, Gotô, Maruyama et Tokunaka, qui forment avec lui les « 5 légendes » de la Playstation, histoire d’avoir une vision beaucoup plus globale des différents aspects de la PlayStation, sur le plan technique, design, software, marketing, la distribution…

Ce livre a été écrit en 2000, Pix a rajouté des notes en bas de pages pour mettre à jour certaines informations.

Ce volume 1 peut très bien se lire sans avoir le volume 2, par contre, l’inverse est moins le cas. En effet, le deuxième tome apporte des informations supplémentaires par le biais des nombreuses interviews et témoignages recueillis mais sans l’apport d’éléments de base du premier volume, sa compréhension s’en sera que plus rude. Le choix de Pix de rassembler les 2 bouquins étaient donc opportun, vendre le volume 2 séparément l’est un peu moins.

Sinon, les deux livres sont des traductions. J’ai noté quelques erreurs, dans les 2 volumes, mais rien de bien méchant.

S’il y a un petit bémol a émettre concernant ces ouvrages, c’est leur centration sur le Japon, pays d’origine de la PlayStation. Il y a bien une tentative de raconter ce qu’il se passe sur les territoires américains et européens, mais ça reste anecdotique. Mais les amateurs d’histoire des consoles pourront toujours compléter cette lacune avec l’Anthologie PlayStation de chez Geeks-Line, dans laquelle les détails européens de la commercialisation auront été largement évoqués.

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Miam !

Ouvrage qui vous permettra d'en savoir un peu plus sur Ken Kutaragi, cet homme de talent, visionnaire, déterminé !

  • Packaging
    9
  • Contenu
    8.5
  • Intérêt général
    8.5
  • Prix
    8.5
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A propos du gangeekeur

Nana de 36 ans n'ayant plus quitté l'univers des jeux vidéo depuis son 7ème anniversaire, avec la réception d'un pack gameboy avec Tetris et Kirby ! Plutôt attirée par l'univers Nintendo au départ, par la suite a succombé aux charmes de la PS1 avec son lot de RPG. Genres de prédilection : la plateforme et les jeux de rythme

4 commentaires

  1. Merci beaucoup pour cet avis-résumé très détaillé et pertinent, comme d’habitude avec vos critiques de livres 🙂 !

    Si je puis me permettre un poil d’auto-promotion, Pix’n Love vient de sortir un ouvrage auquel j’ai contribué et qui vise justement à compléter le contenu de ces deux livres :
    Le hors série Pix’n Love « Playstation VS Saturn » :
    http://www.editionspixnlove.com/LHistoire-du-Jeu-Video/Pix-n-Love-HS-1-PlayStation-VS-Saturn/flypage.tpl.html

    La partie « Histoire de la PlayStation » de ce livre essaie d’apporter des informations inédites (notamment par rapport à tous les articles ou ouvrages parus récemment pour les 20 ans de la console) par le biais d’interviews de personnes ayant participé à l’arrivée de Sony dans les jeux vidéo. Entre autres, des détails sur la manière dont Sony recrutait et accompagnait des studios tiers aux USA, l’anecdote d’un éditeur qui a tenté de corrompre les équipes « assurance qualité » de Sony pour leur faire valider un titre de mauvaises qualité, les différents prototypes et démos produites pour mettre en avant la console, les kits de développement utilisés pour créer des jeux PSX, les premiers pas de Sony dans le jeu vidéo en tant qu’éditeur avec Sony Imagesoft, comment Sony a embrouillé Atari pour « étudier » la Jaguar avant sa sortie, et bien entendu l’évolution du projet « PlayStation » d’un lecteur CD pour la SNES à une console autonome…

    Et en plus, la seconde moitié du livre (300 pages en tout) est consacré à l’histoire de la plus féroce rivale de la PSX : la Saturn de SEGA, au destin tragique malgré des qualités certaines.

    Bref, je ne suis bien évidemment pas objectif, mais j’espère que le livre vous plaira pour approfondir encore plus l’histoire de la PSX ! 🙂

  2. Shining Force IV le

    Merci pour cette excellente critique Kem.

    Damien, une PlayStation c’est une PS. Ou une PSOne.
    Ou éventuellement une PS1.

    Sur ce, je vais jouer à ma PSX2… 😉

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